Le début de la fin ?
Stefan Rondorf / 04.02.2022
Une information est étonnamment passée presque inaperçue sur les marchés financiers, ballottés par les turbulences en début d’année : les modèles de projection relatifs au Covid-19 de l’université de l’État de Washington, reconnus dans le monde entier, prédisent un recul extrêmement rapide, si ce n’est brutal, des taux de contamination en février et mars dans de nombreux pays : serait-ce le début de la fin de la pandémie ? Certains arguments solides avancent à tout le moins un bien meilleur contrôle possible de la pandémie cette année : les
(rappels de) vaccins ainsi que le nombre extrêmement élevé de contaminations des dernières semaines devraient se traduire par une forte immunité de la population, ce qui freinera l’émergence de nouveaux variants. Les progrès médicaux permettent une adaptation toujours plus rapide des vaccins aux nouveaux variants. Par ailleurs, de nouveaux médicaments efficaces réduisent le risque de mortalité pour les formes les plus graves de la maladie. Alors, tout est bien qui finit bien ?
Cela ne semble pas aussi simple du point de vue des marchés financiers, comme les questions suivantes le soulignent :
- Est-ce qu’un ralentissement potentiel de la pandémie signerait aussi le début de la fin de l’inflation ? Pas partout et pas tout de suite : même si de premiers signes d’apaisement émanent des chaînes d’approvisionnement mondiales, le processus de retour à la normale devrait prendre plusieurs trimestres. Par ailleurs, les prix des produits sont surtout influencés par la baisse des coûts du transport et la relance des activités de production. En revanche, les prix des services sont davantage tributaires des coûts salariaux. À cet égard, nous observons de fortes hausses, notamment aux États-Unis ; une situation qui devrait persister malgré le retour sur le marché de l’emploi de nombreux travailleurs. Seul le taux annuel de hausse des prix de l’énergie devrait continuer de baisser.
• Quelles seront les conséquences de la levée des restrictions sanitaires sur la conjoncture ? La demande de voyages, manifestations et autres offres de loisirs devrait considérablement augmenter. Toutefois, certaines activités comme les vacances ne peuvent pas être totalement « rattrapées », raison pour laquelle la demande latente des consommateurs ne devrait se concrétiser qu’ en partie.
En revanche, la demande en biens de consommation (p. ex meubles), qui avait explosé durant la pandémie, pourrait progressivement refluer. Le secteur manufacturier affiche des carnets de commandes bien remplis qui devraient pouvoir être honorés à mesure que les restrictions disparaîtront et que l’approvisionnement en produits intermédiaires reviendra progressivement à la normale. Dans l’ensemble, la croissance devrait rester dynamique cette année. - Qu’est-ce que cela implique pour les banques centrales ?Ces derniers mois, de nombreuses banques centrales, dont la Réserve fédérale américaine, se sont engagées sur la voie de la lutte contre l’inflation. Même si la flambée des prix pourrait ralentir dans certains secteurs, les banques centrales ne changeront sans doute pas leur fusil d’épaule de sitôt. Par ailleurs, elles auraient moins besoin de tenir compte des risques conjoncturels baissiers posés par la pandémie et devraient donc poursuivre le retrait progressif des mesures de soutien monétaire.
Ces premiers pas dans un monde post-pandémie sont encore marqués par de nombreux facteurs d’incertitude. Mais ils soulignent un environnement en mal de différenciation : la distinction entre les pays (qui sortira de la pandémie et en combien de temps ?), mais aussi entre les secteurs économiques et industriels (qui en profitera, où se situent les capacités sous-exploitées, quels chiffres d’affaires et bénéfices pourraient en pâtir ?) jouera un rôle clé. Autrement dit, un environnement idéal pour les gérants actifs.
« Au final tout ira bien. Si ça ne va pas, c’est que ce n’est pas la fin ».
Sincèrement,
Focus sur les marchés
Allocation tactique actions et obligations
- De nombreuses classes d’actifs ont connu un début d’année poussif. L’annonce plus rapidement que prévu du durcissement monétaire de la Réserve fédérale américaine a entraîné une vague de réduction des risques au sein des portefeuilles, qui s’est intensifiée sous l’effet des taux de contamination en forte hausse et de l’escalade des tensions entre la Russie et l’OTAN.
- Les dernières données conjoncturelles ont été hétérogènes, tant au niveau des pays que des secteurs. Alors que l’économie se raffermissait aux États-Unis à la fin du quatrième trimestre 2021, elle ralentissait en Europe notamment sous l’effet de la vague Omicron. Les signes de stabilisation se multiplient en Chine. Le secteur manufacturier profite d’un retour très progressif à la normale des chaînes d’approvisionnement tandis que le secteur des services souffre d’un deuxième hiver de pandémie. Dans l’ensemble, la croissance reste solide et devrait profiter de l’apaisement des craintes liées à la pandémie durant l‘année.
- L’inflation devrait rester un sujet de préoccupation important. Alors que les prix des produits pourraient redescendre si l’approvisionnement s’améliore, nous anticipons une augmentation des prix des services qui devrait continuer de freiner les obligations nominales.
- En conséquence, le durcissement de la politique monétaire devrait se poursuivre. Lors de sa séance de Février, la Réserve fédérale a annoncé un cycle de relèvement des taux pour le mois de mars. Nous prévoyons désormais au moins quatre hausses de taux dans le courant de l’année 2022. Par ailleurs, la Réserve fédérale pourrait amorcer la réduction de son bilan au second semestre, ce qui annoncerait la fin des avalanches de liquidités dans le monde.
- Dans ce contexte, une prudence accrue s‘impose. Une plus grande sélectivité dans le choix des investissements ciblés du point de vue régional et sectoriel devrait continuer de porter ses fruits.
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Ukraine : les investisseurs doivent privilégier la prudence
Résumé
Alors que la Russie entame une invasion à grande échelle de l'Ukraine, les investisseurs déjà vigilants devraient adopter une position encore plus prudente en matière d'actifs risqués. Alors que le déroulement du conflit n'est pas encore connu, les implications seront de grande ampleur pour les marchés, la hausse des prix de l'énergie faisant grimper une inflation déjà élevée.
Points essentiels à retenir
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