« Nous sommes historiquement structurés pour répondre aux exigences du premier assureur mondial. »
Franck Dixmier,
Global Fixed Income CIO, Allianz Global Investors
En tant que directeur de la gestion obligataire mondiale d’Allianz Global Investors, vous avez une grande expérience de la gestion assurantielle. Quelles sont, selon vous, les spécificités de la gestion assurantielle par rapport à la gestion obligataire traditionnelle ?
Franck Dixmier : Je gère des portefeuilles pour le compte d’assureurs depuis plus de 25 ans et j’observe ainsi plusieurs différences majeures. Tout d’abord, la gestion obligataire a pour objectif de délivrer une performance au regard d’un indice de référence, tandis que la gestion assurantielle intègre des contraintes comptables et réglementaires, au-delà de la performance financière, participant au pilotage des provisions, du bilan et du compte de résultat des assureurs. Ces derniers mettent ces objectifs sur un pied d’égalité ou en privilégient certains, selon le contexte et leur situation. La gestion assurantielle est multi-facettes et le gérant devra répondre au mieux à ces besoins. En outre, son horizon est long terme, car les actifs sont adossés à des engagements de passif, et les marges de manoeuvre en termes d’arbitrages, les positions tactiques, sont limitées. Il est ainsi essentiel de bien anticiper les tendances de fond sur les marchés, telles que les conséquences des actions des banques centrales, le phénomène actuel de répression financière, qui s’illustre par des taux très bas, voire négatifs.
« En gestion assurantielle, l’horizon est long terme, aussi il est essentiel de bien anticiper les tendances de fond sur les marchés. » |
En quoi bien appréhender les conséquences de cette approche long terme est-il particulièrement crucial sur le crédit ?
Franck Dixmier : Nous sommes très exigeants sur la qualité de crédit des émetteurs car nous pouvons être structurellement exposés à des émetteurs sur le long terme. Des obligations d’entreprises permettent de rehausser le rendement d’un portefeuille et nous pouvons en tolérer une certaine volatilité, mais le risque de défaut doit être géré avec une extrême attention. Et ce d’autant plus que les assureurs détiennent des positions de taille importante, dont il peut être difficile de sortir au vu du recul de la liquidité sur cette classe d’actifs. Nous devons donc fonder nos décisions d’investissement sur des convictions fortes, en nous appuyant sur une très solide équipe d’analyse crédit, dotée de 25 professionnels qui ont développé leurs propres modèles. Nous modélisons le bilan de chaque émetteur afin d’évaluer sa capacité à faire face à ses engagements dans des scénarios adverses. Et dans cet univers, la palette des actifs est large puisque nous cherchons aussi à capter des primes d’illiquidité sur la dette privée d’entreprises ou d’infrastructures, dont les maturités très longues sont bien adaptées à la couverture des engagements des assureurs.
Comment les critères ESG (environnement, social, gouvernance) sont-ils intégrés dans votre gestion assurantielle ?
Franck Dixmier : Dans ce domaine aussi, notre horizon long terme a une influence majeure sur la politique d’investissement. Nous mettons en oeuvre une approche ESG sur l’ensemble du périmètre de la gestion assurantielle. Ce qui fait d’ailleurs écho au positionnement du groupe Allianz, qui affirme depuis longtemps ses convictions dans ce domaine. Ces critères nous sont indispensables et ils enrichissent en particulier notre bonne compréhension des risques des émetteurs que nous suivons. Ils permettent de passer en revue toute la palette de leurs risques potentiels sur le long terme.
« Nous mettons en oeuvre une approche ESG sur l’ensemble du périmètre de la gestion assurantielle. » |
La gestion assurantielle et la stratégie LDI (liability driven investment) forment un même pôle au sein d’AllianzGI. Pourquoi avez-vous choisi d’associer ces deux expertises ?
Franck Dixmier : Il y a une grande similitude entre les approches de la gestion assurantielle et du LDI : il s’agit d’offrir des solutions sur mesure. Nous totalisons 132 milliards d’euros d’actifs gérés pour l’ensemble de ce pôle. Nous devons répondre à un besoin précis, après analyse des engagements au passif d’un investisseur, assureur, fonds de pension ou caisse de retraite. Les compétences sont donc proches, notamment en termes d’interactions avec nos clients : elles sont permanentes et la démarche est itérative, évoluant au gré de l’évolution du passif.
De même, les actifs Core du groupe Allianz et de vos clients assureurs tiers sont gérés au sein d’une même plateforme. Quels sont les avantages de cette organisation ?
Franck Dixmier : Cette organisation n’est pas commune parmi les sociétés de gestion. C’est un choix totalement assumé et une grande force du positionnement stratégique d’AllianzGI. Nous sommes historiquement structurés pour répondre aux exigences du premier assureur mondial, qui sont très élevées, et nous en tirons une grande crédibilité en tant que gestionnaire d’actifs, vis-à-vis des acteurs du monde de l’assurance. Nous nous devons d’être à l’état de l’art sur l’ensemble de leurs enjeux, de contraintes de passifs, de conformité aux normes réglementaires et comptables qui encadrent leurs activités. En complément, cette organisation nous permet d’offrir à nos clients assureurs l’opportunité de participer à des opérations de co-investissement dans l’univers du non-coté. Nous accompagnons en effet le groupe Allianz dans sa stratégie de diversification, en particulier sur la dette infrastructures et la dette privée corporate, puis nous pouvons donner accès à ces classes d’actifs à des assureurs tiers, qui bénéficient ainsi de notre antériorité et de notre capacité d’incubation.
Résumé
Nous nous distinguons par une culture du co-investissement, qui se traduit par la possibilité offerte à nos clients tiers d'investir aux côtés d'Allianz, ce qui illustre un fort alignement d'intérêts