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Marchés actions européens : Le « luxe » de la résilience
De nombreux secteurs ont souffert des multiples effets secondaires de la pandémie de Covid-19 en 2020. Cela n’a pas été le cas du luxe, qui a favorablement surpris les analystes en esquivant les incertitudes de l’année avec une impressionnante agilité. Alors que l’indice MSCI Europe s’inscrivait en baisse de 3%, le trio de tête du secteur clôturait l’année sur une note positive, voire très positive pour les deux premiers. C’est ainsi que les cours de LVMH, Richemont et Kering ont respectivement augmenté de 37,8%, 7,5% et 1,3%. Hermès (+32,9%) et Moncler (+25,13%) sont deux autres exemples d’excellentes performances du secteur. Comment ces marques ont-elles réussi à prospérer malgré le confinement et les restrictions sanitaires ? Sur quoi s’appuient leurs perspectives prometteuses ? Trois facteurs ont contribué à former un cercle vertueux de résilience : la capacité à capter le boom de la consommation chinoise, l’accélération de l’adoption des solutions numériques et la transition anticipée et souvent exemplaire vers des modèles économiques durables.
Chine : le nouvel Eldorado du luxe
Selon des estimations, la Chine aurait capté 46% des dépenses mondiales dans le luxe en 2020, soit une hausse de 35% par rapport à 2019, et devrait être le marché le plus dynamique dans les années à venir1. Les États-Unis restent le premier marché de LVHM, qui constitue un bon indicateur de l’industrie du luxe, mais devraient être détrônés par la Chine d’ici 5 ans, d’après le Directeur général de Louis Vuitton2. Cette tendance a été renforcée par le redémarrage rapide et soutenu de l’activité économique dans le pays dès le début du second semestre alors que les mesures de confinement et les restrictions appliquées aux entreprises et aux déplacements paralysaient encore le reste du monde. Cette situation a dopé de manière exponentielle la consommation des Chinois, donnant naissance aux phénomènes dits des « achats de revanche » (frénésie d’achats à la suite de la frustration de ne pas avoir pu acheter à cause des mesures de confinement) ou des achats vestimentaires liés au plaisir des retrouvailles post-crise, selon certains observateurs. Si l’on considère le comportement d’achat des Chinois dans le segment du luxe, on constate que 80 à 85% des achats ont été effectués localement en 2020, alors que plus de deux tiers l’avaient été dans des hauts lieux du tourisme mondial avant la crise1. Sur fond de fortes perturbations des voyages internationaux, les consommateurs chinois se sont rués sur les destinations commerciales nationales telles que Hainan, une île connue pour son duty-free. Les ventes en duty-free ont bondi de près de 170% sur l’île en 20203 tandis que les dépenses effectuées par les visiteurs ont explosé de 227% pour atteindre 1,1 milliard d’euro sur la période du 1er juillet au 30 septembre 20201.
Les grandes marques de luxe se sont rapidement adaptées à cette nouvelle réalité et amorcé leur migration à l’est. Cartier a dévoilé sa nouvelle montre Pasha en Chine en juillet, deux mois avant le reste du monde, tandis que le défilé Moncler Genius, traditionnellement organisé à Milan, se déroulera pour la première fois à Shanghai en 2021. LVMH s’est efforcé d’adapter ses produits aux goûts locaux : sacs à main de plus petite taille, montres à bracelets métal et…beaucoup de rouge. Les ventes de Richemont en Chine ont bondi de 80% au T4 2020, alors qu’elles se sont inscrites en baisse de 20% en Europe4.
Commerce électronique : un canal de distribution en pleine expansion
Cette forte dynamique de croissance en Chine a certainement pesé dans la décision du groupe suisse de conclure un accord avec Alibaba pour investir 1,1 milliard de dollars dans la plateforme de mode en ligne Farfetch afin de prendre pied dans l’e-commerce chinois. Une démarche intéressante si l’on considère que la part des achats en ligne mondiaux dans le luxe, qui s’établissait à 12% en 2019, atteignait 23% en 2020 et devrait s’élever à 25% entre 2023 et 2025. La Chine a une bonne longueur d’avance avec 37% des achats de luxe effectués en ligne aujourd’hui1.
La pandémie a accéléré le recours aux réseaux sociaux et la transformation numérique non seulement en Chine, mais aussi dans le reste du monde. Un cap symbolique a été franchi avec les dernières Fashion Weeks qui ont permis aux marques de luxe d’innover puisqu’il leur était impossible d’organiser des défilés dans les conditions habituelles. C’est ainsi que le 17 septembre 2020, Burberry a retransmis son défilé printemps/été 2021 en partenariat avec Twitch. Grâce à la fonction Squad Stream de Twitch, les invités virtuels ont pu visionner le défilé sous de multiples angles tout en ayant la possibilité d’échanger en direct. Balenciaga, qui appartient au groupe Kering, a dévoilé sa pré-collection 2021 via une vidéo en ligne tournée dans les rues de Paris à la manière d’un clip-vidéo. L’un des grands avantages de l’e-commerce, c’est que les quantités de données recueillies sur les consommateurs permettent d’obtenir de nombreuses informations sur leur comportement et leurs préférences d’achat, ouvrant la possibilité de les influencer. Par ailleurs, les achats en ligne restent importants à la réouverture des magasins, ce qui laisse à penser que les deux formes d’habitudes de consommation coexistent, mais avec une augmentation de la part du commerce en ligne.
La mode entre dans une nouvelle ère
Le secteur est également en pleine transformation s’agissant de l’ESG (Environnement, Social, Gouvernance). À des années-lumière de leurs concurrents « fast fashion » dans le domaine de la durabilité, certaines grandes marques de luxe cherchent à répondre à l’engouement croissant de leur clientèle pour les produits responsables et imposent de nouvelles règles à l’ensemble du secteur, ce qui pourrait s’avérer un avantage stratégique clé pour leur croissance à long terme. Le modèle « take-make-dispose » (extraire, fabriquer, jeter) de la mode éphémère est de plus en plus remis en cause, alors qu’on sait aujourd’hui qu’il faut en moyenne 2,5 ans pour consommer le volume d’eau utilisé pour fabriquer une seule chemise en coton. Un fait donne un avant-goût des défis à venir : le secteur de l’habillement et de la chaussure est la deuxième industrie la plus polluante au monde, représentant environ 10% des émissions de gaz à effet de serre mondiales, soit l’équivalent des rejets combinés des vols internationaux et des transports maritimes5.
L’équipe Conviction Equity a décidé de ne pas investir dans les acteurs du « fast fashion » pour se concentrer sur les marques de luxe les plus avancées dans les modèles de mode durable, à l’instar de Kering et de LVMH, qui sont actuellement à la pointe de la transition du secteur vers plus de durabilité et respectent les critères d’éligibilité ISR (Investissement Socialement Responsable). Kering et LVMH s’engagent depuis 2012 en faveur de pratiques plus transparentes et éthiques au niveau des chaînes d’approvisionnement de leurs vêtements, recherchés et reconnus pour leur longévité.
Kering se classe parmi les 10 entreprises les plus durables au monde
Le groupe Kering, qui se démarque depuis longtemps de la concurrence en matière de durabilité, a récemment intégré le top 10 des entreprises les plus durables au monde au sein du classement annuel Global 100 2021 établi par Corporate Knights et occupe le premier rang dans la catégorie « textile, habillement et accessoires » pour la quatrième année consécutive. Kering externalise une grande partie de sa production, ce qui peut poser un risque en termes d’exécution, de qualité et de réputation. Pour se protéger contre ce risque, Kering a mis en place en 2015 une politique de surveillance de la chaîne de sous-traitance claire, suivie de la création des « Kering Standards » en 2017 : ces critères sociaux et éthiques partagés par toutes les maisons du groupe régissent l’approvisionnement en matières premières et les procédures de fabrication. Les « Kering Standards » définissent également un certain nombre d’exigences relatives au bien-être animal et des règles interdisant la déforestation. Tous les fournisseurs de Kering devront s’y conformer d’ici 2025.
Autre mesure forte prise par Kering, le compte de résultat environnemental (EP&L), qui mesure l’impact de ses activités. Le groupe utilise cette méthode de comptabilité environnementale pour comprendre et mieux gérer sa chaîne d’approvisionnement et a mis en place des programmes visant à améliorer son accès à des matières telles que le cashmere durable et le coton bio. Kering s’est engagé à réduire son empreinte EP&L de 40% tout au long de la chaîne d’approvisionnement d’ici 2025 par rapport à sa croissance (année de référence : 2015).
LVMH et le programme LIFE
LVMH a mis en place le programme LIFE (LVMH Initiatives for the Environment), qui encadre des initiatives en faveur de l’éco-conception de produits et de la consommation d’énergie. LVHM souhaite notamment que 70% de ses chaînes d’approvisionnement respectent les exigences environnementales les plus strictes en 2020 et entend atteindre un taux de 100% d’ici 2025. LVMH s’est également engagé à réduire ses émissions de CO2 en lien avec la consommation d’énergie de 25% d’ici 2020 (par rapport à 2013). Celles-ci ont déjà diminué de 16% entre 2013 et 2018 malgré la croissance du groupe durant cette période.
À noter également, les objectifs fixés par le groupe au niveau des emballages. Ainsi, LVMH souhaite améliorer la performance environnementale de 100% de ses produits (contre actuellement 90% pour les parfums et cosmétiques, et 48% pour la maroquinerie). Pour les parfums et les cosmétiques en particulier, les maisons LVMH développent le concept d’emballage rechargeable (crèmes et sérums Christian Dior, parfums Guerlain).
Dans l’ensemble, l’année 2020 aura été favorable aux grands acteurs européens de l’industrie du luxe, soutenue par la consommation chinoise, une adaptation rapide au commerce en ligne et son avance en termes de transition verte. Les experts de l’équipe Conviction Equity estiment que ces atouts, qui ont été mis au jour et sans doute accélérés par la crise sanitaire, devraient être source de valeur ajoutée sur le long terme.
Sources :
1. China and Luxury, AlphaValue research, novembre 2020
2. Michael Burke: why China is the future for Louis Vuitton, Financial Times, 19 août 2020
3. Luxury Sales Soar in China as Tourists Spend Closer to Home, Dow Jones/Bloomberg, 5 février 2021
4. Richemont sales rise on strong demand in Asia, Financial Times, 21 janvier 2021
5. Global Fashion: Green is the new black, Barclays Research, janvier 2020Ces informations ne constituent ni une recommandation ni une sollicitation d’achat ou de vente d’un quelconque titre en particulier.
Ces informations ne constituent ni une recommandation ni une sollicitation d’achat ou de vente d’un quelconque titre en particulier.
Résumé
Le nombre d'animaux de compagnie et l'argent qu'on leur consacre n'ont cessé d'augmenter ces dernières années. La pandémie de Covid-19 a encore renforcé cette tendance . La nouvelle économie des animaux de compagnie a-t-elle quelque chose à offrir ?